Revue d’Histoire du Théâtre • N°261 T1 2014
La Comédie-Française entre gloire symbolique et logique mercantile : l’été 1753 dans la querelle des « agréments »
Par Agnès Vève-Lamy
Résumé
Durant l’Ancien Régime, les « agréments » du théâtre (comprendre l’usage de la musique, de la danse et des machines) sont l’enjeu d’une querelle au long cours entre les scènes parisiennes. L’Opéra, propriétaire des agréments grâce à son privilège exclusif, est le meneur de jeu de cette querelle. D’une main, il encourage l’expansion des forains en leur sous-louant son privilège, de l’autre, il tente d’affaiblir la Comédie-Française (et la Comédie-Italienne) en leur interdisant la musique et les ballets. Face à la vogue grandissante du « grand spectacle » et des « divertissements », la Comédie-Française n’aura de cesse de conquérir ces agréments si précieux jusqu’à l’été 1753, date à laquelle elle obtient finalement une permission officieuse des autorités. Mais cette lutte entre scènes « privilégiées » et la course au spectacle d’un théâtre nanti d’une mission et d’un répertoire de prestige sont, pour beaucoup d’observateurs, des signes de la faillite du système centralisé mis en place sous Louis XIV. La critique – et notamment F. M. Grimm qui commente l’épisode de 1753 dans sa Correspondance littéraire – dénonce le mercantilisme d’une institution par ailleurs incapable de légitimer son rang de « premier théâtre de la nation ».
Abstract :
During the Ancien Régime, theatrical « agréments » (that is, the use of music, dance and machines) were the subject of a long-running quarrel on the Parisian stage. The Opéra, the owner of these « agréments », thanks to its exclusive privilège, was the leading party in this quarrel. On the one hand, it encouraged the expansion of the fairground theatres, by sub-letting them its privilège, but on the other, it tried to weaken the Comédie-Française (and the Comédie-Italienne), by forbidding them to include music and ballets. As the trend for « grand spectacle » and « divertissements » grew, the Comédie-Française constantly tried to acquire the right to use these precious « agréments », until the summer of 1753, when it finally obtained official permission to do so. But this struggle between the privileged theatres, and the fact that a theatre already endowed with its own prestigious mission and repertoire had recourse to such « spectacle » were, for many observers, signs that the centralised system put in place by Louis XIV had failed. Critics – and particularly Grimm, who described the episode of 1753 in his Correspondance littéraire – denounced the commercialism of an institution that was otherwise incapable of legitimising its place as the principal theatre of the nation.
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