Dictionnaire des metteuses en scène
Anne-Laure LiégeoisMétiers: Comédienne, Metteuse en scène, Scénographe
Pays d'exercice: France
Organisations ou collectifs liés: Centre Dramatique National Montluçon, Compagnie Le Festin
Personnalités liées: Jean-Claude Penchenat, Olivier Dutilloy, Ulysse Dutilloy-Liégeois
Notice rédigée par Joël Huthwohl
Attirée par le spectacle vivant comme spectatrice grâce à des parents passionnés de théâtre, Anne-Laure Liégeois découvre très jeune les mises en scène de Peter Brook, Antoine Vitez et Patrice Chéreau. Elle suit d’abord des études de lettres classiques, avant de se tourner vers la pratique scénique via les ateliers du Théâtre du Campagnol dirigé par Jean-Claude Penchenat. Initialement comédienne, elle est rapidement sollicitée pour animer à son tour des ateliers et faire ainsi ses premiers pas de metteuse en scène. En 1992, elle traduit et met en scène Le Festin de Thyeste de Sénèque, spectacle qui donne son nom à la compagnie qu’elle fonde en 1994, baptisée “Le Festin”. C’est aussi le nom qu’elle donnera au Centre dramatique national de Montluçon dont elle sera la directrice de 2003 à 2011.
Comme metteuse en scène, elle monte, en 1993, Le Fils de Christian Rullier, spectacle déambulatoire dans des sites industriels désaffectés avec une distribution nombreuse réunissant comédiens professionnels et amateurs. Ces caractéristiques – spectacle mobile, utilisation d’espaces non théâtraux, diversité et foisonnement des participants – marquent durablement son travail, de même que le choix de concevoir elle-même décors et costumes. Ces principes se retrouvent dans Ça, qui réunit des auteurs et des comédiens dans des chambres en plein air, et Embouteillage qui associe 27 auteurs et 50 acteurs et installe le public dans une file de 35 voitures, spectacle qui a tourné du Festival d’Avignon à La Villette, des falaises de Fécamp à une clairière de la Forêt-Noire. Dans le même esprit, elle imagine des événements pour des lieux patrimoniaux comme le Musée de l’Homme avec Tandis que la terre tourne, ou la Bibliothèque nationale de France avec Richelieu, le réveil, festivités où les visiteurs découvrent au fil du parcours des propositions artistiques variées, théâtrales, musicales et acrobatiques. La dimension collective de chaque nouvelle aventure théâtrale est pour Anne-Laure Liégeois déterminante ainsi que l’esprit d’ouverture et de liberté dans la manière d’aborder les œuvres et leur mise en scène.
La mise en scène de L’Augmentation de Georges Perec, dont la première version date de 1995, marque son intérêt pour des textes qui questionnent la société contemporaine, en l’occurrence le monde du travail, thème qui se retrouve dans L’Intérimaire de Rémi de Vos et Le Marché de Jacques Jouet, trois pièces qui forment une trilogie intitulée Entreprises. Le thème est à nouveau présent dans l’adaptation des Châteaux qui brûlent d’Arno Bertina en 2022. D’autres thèmes actuels traversent les spectacles d’Anne-Laure Liégeois comme l’exclusion dans Débrayages, l’adolescence dans Burn Baby Burn ou les enfants soldats dans Le bruit des os qui craquent. Ces choix vont de pair avec la volonté d’être à l’écoute du public et d’entrer en relation avec les spectateurs sur des sujets qui le concernent. Ils témoignent aussi d’un désir permanent d’explorer la littérature dramatique contemporaine, avec Naomi Wallace ou Patrick Kermann, voire par des commandes à des auteurs, comme David Lescot sur la vie des époux Ceausescu ou en 2021 à dix auteurs pour Fuir le fléau, en contrepoint de la pandémie. Son goût pour le texte l’amène aussi à mettre en scène le répertoire classique et à donner sa propre lecture d’œuvres de Sénèque, Euripide, Molière, Shakespeare, Marlowe, Racine, Marivaux, Lenz… Son travail passe par une analyse en profondeur de l’écriture mais aussi par la confrontation avec le corps de l’acteur, cherchant toujours à lier l’intime et l’universel.
Prix de la mise en scène de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (2013)
Officier des Arts et Lettres (2023)
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