Revue d’Histoire du Théâtre • N°294 T3 2022
Les archives du théâtre yiddish
Par Léonor Delaunay, Patrick Le Bœuf
Résumé
Présentation des archives du théâtre yiddish de par le monde par Léonor Delaunay et présentation détaillée des fonds dédiés à ce théâtre dans les collections du département des Arts du spectacle de la BnF, par Patrick Le Boeuf.
Texte
L’attention aux archives concernant le théâtre yiddish se révèle déterminante pour mieux cerner ce champ de recherches encore en défrichage et aux perspectives multiples.
Les archives existent, en nombre, mais il faut les dénicher, les rassembler, le théâtre yiddish ayant été peu scruté, peu observé et chroniqué par les journaux, il manque souvent le matériel habituel des revues et des coupures de presse. Photographies, affiches, programmes, et textes ont tout de même survécu à cette première absence, puis à la Shoah.
Dans le monde
L’Amérique du Nord et l’Angleterre semblent avoir été particulièrement conscients de la fragilité et, partant, de la nécessité de préserver et de transmettre les traces de la culture yiddish, pour laquelle le théâtre occupe une place importante.
Par exemple, à la New York Public Library, cela fait longtemps que les archives de la culture yiddish sont numérisées, et le théâtre y est omniprésent (1200 ouvrages, romans et pièces de théâtre, et 750 documents)[1], des archives par ailleurs fragiles, modestes, des programmes de deux pages sur un papier peu cher, des photographies…
Au Québec, l’historien du théâtre Jean-Marc Larrue a mené, au sein de l’Université l’uqam, un vaste chantier d’étude et de préservation des archives du théâtre yiddish[2].
C’est à cet inventaire non exhaustif[3] que cette section autour des archives du théâtre yiddish souhaite s’atteler. Une première cartographie des différents lieux et des différentes opérations de sauvegarde et de la transmission de ce théâtre selon les pays (Canada, États-Unis, Angleterre, France, Pologne, Hongrie… sans oublier l’Allemagne, et bien sûr la Russie) pourrait être ainsi envisagée, les instruments numériques jouant ici un rôle important pour la transmission de ces expériences artistiques issues de la diaspora.
En France, de nombreux fonds permettent non seulement de découvrir et de retracer les parcours et les expériences de théâtre yiddish sur le territoire français au XXe siècle.
Des fonds photographiques sont conservés et étudiés par des historiens du théâtre yiddish, permettant de découvrir la richesse de cette histoire. On pourra découvrir les archives conservées par la Maison de la culture yiddish-Bibliothèque Medem[4], les fonds photographiques et la bibliothèque du Musée d’art et d’histoire du judaïsme[5], des cartes postales représentant des actrices du théâtre yiddish, numérisées par Akadem[6].
Les ouvrages «Tutto era musica» (Accademia University Press) publiés par, entre autres, Antonio Attisani, sur le théâtre yiddish. Ils sont disponibles en open access sur le site de l’éditeur http://www.aaccademia.it/elenco-libri?aacat=arti
Les cours en ligne sur le théâtre yiddish, coordonné par Stephanie Halpern, directrice assistante des archives du yivo : https://www.yivo.org/OhMama)
Les archives du Musée du Théâtre Esther Rokhl Kaminska : https://vilnacollections.yivo.org/New-VCP-Scholar
Aux Archives Nationales
Il existe plusieurs dossiers entre 1954 et 1965 sur des artistes et des théâtres yiddish[7] :
– Habimah Theatre de Tel Aviv, Théâtre municipal de Haïffa, The Cameri Theatre ; Samy Molcho (mime), Deborah Bertonoff, Inbal (Ballet Israël), Rina Shaham Dance Quartet, Batshevo Dance Company).
Dans le fonds des licences d’entrepreneurs de spectacle (à partir de 1946) :
Un questionnaire auquel répondent les demandes de licences d’entrepreneur du spectacle :
– 19930049/8. Dossier de Gueschwind dite Arenstein Rosa, Théâtre populaire juif (Paris)
– 19930049/9. Dossier de Simcha Schwartz, Théâtre de marionnettes [Hakl-Bakl] (Paris)
Il existe aussi une demande de subvention auprès de la Direction générale des Arts et lettres de Simcha Schwartz pour sa compagnie, 1948-1949 (cote F/21/nc/503).
Dans le dossier on peut trouver quelques coupures de presse sur la réception du premier spectacle proposé par Hakl-Bakl à Paris.
Dans les demandes d’encouragements aux artistes se trouve un dossier au nom de Poliakoff, 7-13 juillet 1926 : F/21/4452
Dans les demandes d’aide à la première pièce se trouve également un dossier au nom d’Henri Sloves, décembre 1955-juin 1964 : F/21/8355
Théâtre du Buisson, à Bagnolet (années 1990)
Dans les archives du Théâtre national de Chaillot se trouve un dossier sur un lecture du théâtre Yiddish (Théâtre du Buisson) : 20160552/73 ; et une lecture de poésie Yiddish : 20170180/150.
Le Théâtre du Buisson [Bagnolet] semble avoir été actif ces dernières décennies autour du théâtre Yiddish (cote 19930036/4).
Archives de police
Dans le fonds de la sûreté générale (Police). Dans le fonds de Moscou il existe de nombreux dossiers sur les journaux et brochures surveillés et/ou interdits. Plusieurs dossiers concernent des journaux soit en yiddish, soit en français mais à destination de la communauté juive de France. Majoritairement, il s’agit de journaux politiques à tendance communiste qui sont saisis et parfois un exemplaire est porté au dossier.
Aux Arts du spectacle de la BnF
Concernant les archives du théâtre yiddish conservées à la BnF, Patrick Le Bœuf, conservateur jusqu’en 2021 au département des Arts du spectacle, dresse dans l’article suivant une présentation détaillée de ces sources :
Le département des Arts du spectacle de la Bibliothèque nationale de France a pour mission de réunir le maximum de documentation sur le spectacle vivant. Il n’est donc pas étonnant que le théâtre yiddish soit représenté dans ses collections, même si ce n’est pas de manière aussi abondante qu’on pourrait le souhaiter et que l’importance de ce théâtre le justifierait. Outre la collection Auguste Rondel, noyau originel du département, cette présentation se concentre plus particulièrement sur la collection Gérard Frydman, consacrée au théâtre yiddish à Paris de 1896 à 1983, et sur les archives d’Edward Gordon Craig, qui s’est passionné pour la production du Roi Lear par le Théâtre juif d’État de Moscou en 1935. Elle évoque également les traductions et adaptations de pièces du répertoire yiddish, la documentation relative aux productions de pièces emblématiques telles que le Dibbouk, et les autres fonds d’archives où l’on peut trouver une documentation sporadique sur le théâtre yiddish.
Notes
[1] https://digitalcollections.nypl.org/collections/yiddish-theater-collection#/?tab=navigation
[2] Jean-Marc Larrue, Le théâtre yiddish à Montréal/Yiddish Theatre in MontrealÉditions JEU, 1996
[3] Une première esquisse d’inventaire de la ressource numérique sur le Théâtre Yiddish a été réalisée par Charlotte Jeanne (Master Archives Université Caen Basse-Normandie), dans le cadre de son stage sur les archives à la Société d’histoire du théâtre en avril-mai 2020.
[4] Voir par exemple les photographies de six comédiennes de théâtre Yiddish : Esther-Rokhl, Ida Kaminski, Clara Young, Sara Adler, Sophie Goldstein-Karp et Bine Abramovitch.
[5] MahJ.org : https://www.mahj.org/fr/decouvrir-collections-betsalel/ensemble-de-18-cartes-postales-sur-le-theatre-yiddish-74657
[6] https://akademimg.akadem.org//Medias/Documents/
[7] Présentation des dossiers effectuée par Émeline Rotolo, des Archives nationales.
Pour citer cet article
Léonor Delaunay, Patrick Le Bœuf, « Les archives du théâtre yiddish », Revue d’Histoire du Théâtre numéro 294 [en ligne], mis à jour le 01/03/2022, URL : https://sht.asso.fr/les-archives-du-theatre-yiddish/