Société d'Histoire du Théâtre

Dictionnaire des metteuses en scène

Tania Balachova

Née le 25/02/1902, Saint-Pétersbourg (Russie)

Décédée le 04/08/1973, Bagnols-de-l’Orne (France)

Métiers: Metteuse en scène

Pays d'exercice: France

Personnalités liées: Antonin Artaud, Catherine Sellers, Claude Régy, Daniel Emilfork, Delphine Seyrig, Jacques Fabbri, Jean Genêt, Marcelle Tassencourt, Michael Lonsdale, Raymond Rouleau

Notice rédigée par Ariane Martinez

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Notice


Née en Russie, Tania Balachova arrive en 1910 à Bruxelles pour rejoindre son père qui y est exilé. Admise au Conservatoire Royal, elle en sort avec le 1er prix en 1925 dans le rôle de Grouchenka des Frères Karamazov. Elle y rencontre Raymond Rouleau, qu’elle épouse et avec qui elle s’installe à Paris en 1927. Séparés d’un commun accord en 1933, ils continuent à collaborer professionnellement. 

Elle joue dans Le Songe de Strindberg, mis en scène par Antonin Artaud (1927), collaboration qui la marque : « il ruinait en vous toutes les données traditionnelles et finissait par reconstruire sur des éléments inconscients. Il nous arrachait des cris qu’on ne savait pas pousser. » (Paul-Louis Mignon, « Tania Balachova », L’Avant-scène, août 1968). Dans les années 1930, elle fréquente le Cartel en jouant dans les spectacles de Dullin (Patchouli), Baty (Maya), et Jouvet (La Guerre de Troie n’aura pas lieu). On vante alors son jeu intérieur, « [s]on corps sculptural, son masque étrange, sa voix aux modulations graves » (George Stuart, Le Soir, 02/03/1930). Son interprétation est saluée dans Huis clos de Sartre (1944, mise en scène Raymond Rouleau), Les Dialogues de Carmélites de Bernanos (mise en scène de Marcelle Tassencourt, 1952), et Les Bonnes de Jean Genêt, qu’elle met aussi en scène en 1954. Ses valeurs sont clairement du côté du théâtre d’art : « Le luxe est un crime contre le théâtre. Seuls comptent le texte et les comédiens. » (L’Aurore, 25 mars 1968).

Dès 1942, elle ouvre à Paris son premier cours d’art dramatique, qu’elle anime trois décennies durant, et où sont formés plusieurs générations d’artistes de théâtre et de cinéma : Raymond Devos, Delphine Seyrig, Stéphane Audran, Laurent Terzieff, Michael Lonsdale, Claude Régy, etc. Si elle y insiste sur le travail « technique », sur la nécessité « d’articuler » et de « timbrer », elle  pense aussi qu’il faut « rêver le rôle » plutôt que « l’exécuter ». Sa devise est : « Ni la sensibilité ni l’intelligence : l’imagination », « le comédien est un virtuose et le metteur en scène n’a pas le droit de le rabaisser au niveau d’un troisième violon ou d’un choriste » (Combat, 4/12/1969). 

Ses mises en scène sont imprégnées de sa pédagogie du jeu, de sa propre expérience d’actrice-créatrice et de sa pratique d’adaptatrice de textes (nouvelles, poèmes, pièces). Parmi ses traits distinctifs, on note le jeu intérieur et la capacité à habiter les silences et à les rendre vivants. Lorsqu’elle monte en 1954 La Peur de George Soria, pièce politique inspirée de l’exécution des époux Rosenberg, les critiques louent la « suspension des mots » ou regrettent au contraire les « blancs, les trous, les lenteurs » du spectacle. En 1966, elle adapte Le Chant du Cygne de Tchékhov pour un rôle féminin. Le spectacle, nommé Lady Macbeth, qu’elle met en scène et dont elle joue le rôle principal, est salué unanimement. Elle y déploie un jeu rhapsodique, fait de ruptures rythmiques et de changements de registres : elle bascule de la « bouffonnerie » au « mélodrame » dans « une sorte de récital haché où passent des fragments de poèmes, de comédies, de tragédie […] des contradictions qui éclairent diversement telle ou telle interprétation sans pour autant perdre de vue la personne humaine de l’interprète » (Jean-Jacques Gautier, « La Matinée d’un homme de lettres et Lady Macbeth, ou de Tchékhov à Balachova », Le Figaro, février 1966, WNT 52).

Mises en scène


  • Nausicaa du Mackensie, mis en scène par Georges Arest et Tania Balachova, tiré d’une nouvelle de Maurice Constantin-Weyer, créé le 12 septembre 1951 au Studio des Champs-Élysées, Paris (France).
  • Le Profanateur, de Thierry Maulnier, créé le 6 janvier 1952, Théâtre de l’Athénée-Louis Jouvet, Paris (France). 
  • La Peur, de Georges Soria, créé le 1 er mai 1954 au Théâtre Monceau, Paris (France).
  • Les Bonnes, de Jean Genet, créé le 13 janvier 1954 au Théâtre de la Huchette, Paris (France).
  • Les Amants puérils de Crommelynck, créé le 13 mars 1956 au Théâtre des Noctambules, Paris (France). 
  • Huis clos de Jean-Paul Sartre, Tréteaux de France, Hunter College, 1962, New York (USA). 
  • La Matinée d’un homme de lettres et Lady Macbeth, d’après des nouvelles d’ Anton Tchékhov, créé en février 1966 au Théâtre Mouffetard, Paris (France). Lady Macbeth est repris en 1968 au Théâtre de Poche Montparnasse, Paris (France).
  • Dialogues d’exilés, de Bertolt Brecht ; texte français de Gilbert Badia et Jean Baudrillard, créé le 20 novembre 1968 au Théâtre des Mathurins, Paris (France). 
  • Suzanna Andler, de Marguerite Duras, créé le 6 décembre 1969 au Théâtre des Mathurins, Paris (France). 
  • Vetcherinka, récitals de poésies russes de A. Block, S. Essenine, B. Pasternak, I. Ehrenbourg, M. Gorki, W. Maïakovski créé en 1972 (projet annoncé dans Le Figaro du 25-26 nov 1972). 

Références bibliographiques


Recueils factices à la Bibliothèque nationale de France, Département Arts du spectacle :

  • Nausicaa du Mackensie : pièce en 2 actes et 8 tableaux… Paris, Studio des Champs-Elysées, 12 septembre 1951], Tania Balachova et Georges Arest, Opéra, Supplément du n°336 d’Opéra, décembre 1951, n° 53. Cote 4-JOW-1641, n°53. 
  • Photographies de Henri George. La Peur, mise en scène de Tania Balachova ; texte de Georges Soria ; décors de Max Douy ; avec Daniel Emilfork, Catherine Sellers, François Perrot [et al.], Théâtre Monceau, 1955-05-04. Cote IFN-10609400. 
  • Recueil factice d’articles concernant Tania Balachova (1902-1973). Cote 8-RT-5706
  • Recueil. Théâtre-école de Tania Balachova 1967-1975. Coupures de presse. Cote 4-SW-7161
  • Recueil. La Peur, de George Soria, coupures de presse, programme, 1954. 8-RSUPP-4082 ou IFN-10545136
  • Recueil. Le Profanateur de Thierry Maulnier, mise en scène de Tania Balachova. Coupures de presse, programme. Cotes IFN-10538423 [8-RSUPP-3395] ; 4-SW-9710. 
  • Recueil. Dialogues d’exilés de B. Brecht. Dossiers de coupures de presse de plusieurs mises en scène, dont celle de Tania Balachova en 1968 au Théâtre des Mathurins. 4-SW-2380 < 1968-1969. 
  • Recueil. Suzanna Andler, de Marguerite Duras, mise en scène de Tania Balachova. Coupures de presse, programme. Représentations diverses en France et à l’étranger en 1969, création au Théâtre des Mathurins, 5 décembre 1969. Cote 4-SW-2731
  • Tania Balachova : dossier biographique. Paris, 1946-1973. Cote WNT 52

Émissions de radio (INA, France Culture) :

  • Images et visages du théâtre d’aujourd’hui, Deux entretiens avec Tania Balachova, comédienne, par Moussa Abadi, 1ère diffusion le 04/04/1968 et le 25/04/1968, Archive INA-Radio France. 
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