Revue d’Historiographie du Théâtre • N°3 T1 2017
Emmanuel Genvrin : constitution à l’Île de la Réunion d’un théâtre des origines – Sur l’absence des origines de ce théâtre
Par Michel Bertrand
Résumé
L’hétérogénéité caractérisant les origines des premiers occupants de l’île de la Réunion pose la question de l’identité nationale d’un territoire qui fut toujours rattaché à la France sans que ce lien institutionnel ne s’avère fondateur d’une identification aux valeurs de « la mère-patrie ». Au travers des mythes, des contes, des fables et de l’ensemble des formes simples du récit, le théâtre réunionnais questionne depuis plusieurs décennies les fondements d’une hypothétique identité réunionnaise. Le dramaturge Emmanuel Genvrin interroge quant à lui les origines de la civilisation réunionnaise à travers la question de son théâtre originaire, et en suscitant des fictions dramatiques de ce récit des origines.
Abstract :
The heterogeneity marking the origins of the first inhabitants of Reunion Island raises the question of national identity for a territory that was always attached to France without identifying its founding values with those of the “Mother Country.” Through myths, tales, fables and other forms of simple spoken narrative, theatre on Reunion has questioned, for several decades, the foundations of its own hypothetical identity. The playwright Emmanuel Genvrin, for his part, interrogates the origins of Reunion’s civilization by means of its originary theatre, giving rise to dramatic fictions recounting those origins.
Texte
Emmanuel Genvrin : constitution à l’Île de la Réunion d’un théâtre des origines
| sur l’absence des origines de ce théâtre
L’île de la Réunion demeura longtemps une île-volcan inhabitée. En 1646, puis en 1654, enfin en 1663, diverses tentatives de peuplement, en nombre chaque fois limité, furent effectuées. L’hétérogénéité caractérisant les origines des premiers occupants de l’île pose la question de l’identité nationale d’un territoire qui fut toujours rattaché à la France[1] sans que ce lien institutionnel ne s’avère fondateur d’une identification aux valeurs de « la mère-patrie ». Au travers des mythes, des contes, des fables et de l’ensemble des formes simples du récit, le théâtre réunionnais questionne depuis plusieurs décennies les fondements d’une hypothétique identité réunionnaise. Considérant qu’en posant en ces termes les données du problème, ce théâtre insulaire ne peut proposer que des fictions dramatisées, Emmanuel Genvrin interroge les origines de la civilisation réunionnaise en questionnant les origines de son théâtre et en suscitant des fictions dramatiques de ce récit des origines. Jouant de l’ensemble des ressources que lui offre une palette historiquement vierge, il situe la naissance d’un théâtre interethnique durant la période révolutionnaire : « Les historiens diront qu’il y a peu de chances que « Zamore et Mirza » ait été connu à la Réunion. Encore moins que des acteurs de couleur aient participé à un tel projet[2] ». Mais l’histoire qu’invente le dramaturge est néanmoins inscrite au cœur même de l’Histoire qu’a vécue l’île sous une forme plus atone, plus grise, moins théâtrale : « La Réunion de la fin du XVIIIe était jeune, métissée, relativement prospère. Les idées révolutionnaires y étaient répandues. Sous des noms différents les Villeneuve, d’Haricourt, Périclès, Excelsior, Carême… etc… ont existé […][3] ».
Revenant aux origines de l’île, et jouant de la ligne horizontale tracée par le fil du temps, Genvrin situe dans Runrock l’action dramatique de la pièce non dans le passé, mais dans un futur lointain. En 2050, un volcan surgi de la mer suscite l’émergence d’une île vierge dont la superficie est estimée à 250 km². Cette irruption inscrite dans un spectacle conçu de manière spéculaire relate conjointement la naissance du théâtre. Plus récemment, Maraina[4] a retracé l’arrivée des premiers habitants sur l’îlot encore désert en 1646, douze émigrants provenant de Fort-Dauphin qui s’installèrent sur le site actuel de la ville de Saint-Paul et n’y demeurèrent que quelques années. Mais, ce faisant, l’oeuvre redéploie la texture musicale de la pièce précédente, substituant la structure de l’opéra à la coloration rock de l’utopie dramatique. Maraina mêle des chants et des musiques malgaches, chinois et indiens aux diverses formes musicales réunionnaises actuelles, héritage métissé des anciens chants d’esclaves.
Afin de rendre compte de ce discours théâtral inventant sans cesse un théâtre originel pour conférer dans et par ce théâtre une origine à la Réunion qu’il sait dans les faits n’avoir pas existé, il conviendra dans un premier temps d’interroger les modalités de cette représentation, qui procède par la re-présentation d’images en fonction du décryptage qu’en offrent les référents insulaires. Puis il faudra étudier comment les ancrages historiques et géographiques avérés procèdent à la configuration dramatique d’un récit des origines grâce à un discours théâtral novateur. Enfin, il importera d’observer comment la quête de la matière s’effectue dans un espace de liberté au sein duquel naît pièce après pièce, représentation après représentation, un théâtre authentiquement apte à inventer dramatiquement une identité réunionnaise.
Commencer
Le 8 décembre 1979, Emmanuel Genvrin, métropolitain résidant depuis peu sur l’île de la Réunion, fait représenter par les comédiens du Théâtre Vollard, troupe qu’il a récemment créée, un Ubu roi réunionnais. La pièce possède pour matrice le texte de Jarry, amplifié par de nombreux emprunts aux divers Ubu de Jarry et replacé dans le contexte créole de la Réunion. Ubu, Jarry, Vollard ; l’apparition de cette compagnie dans le paysage culturel local se place résolument sous l’égide de la pataphysique[5]. Or, ce choix, Genvrin ne le présente pas comme personnel, mais comme dicté par l’identité de cette île qu’il a fait sienne : « Nous connaissions l’histoire et nous avons pris son nom [celui de Vollard] en nous disant que les Caraïbes ou les Antilles étaient plutôt surréalistes et l’île de la Réunion, pataphysique[6] ». Commencer n’implique donc dans un premier temps pour le théâtre Vollard aucune recherche des origines, ni de celles de l’histoire du territoire, ni de celles de son parcours culturel. Commencer consiste à prendre date, à effectuer une photographie de la situation locale prévalant hic et nunc et à lui offrir une transposition théâtrale en puisant dans le répertoire littéraire français. Il est vrai qu’en cette fin des années 1970 tout demeure à inventer dans un espace qui semble dénué de toute spécificité et dont l’existence paraît rythmée par les événements qui se déroulent en métropole. Emmanuel Genvrin, dans un article intitulé « Histoire du théâtre à l’île de la Réunion », démontre qu’aucune évolution notable n’est perceptible sur le plan théâtral entre la situation qui prévalait au XVIIIe siècle et celle qui perdure au moment de la fondation de la troupe Vollard :
Le répertoire est celui de la métropole avec les retards d’usage, comédies légères et proverbes, œuvres lyriques jouées par des acteurs du cru. […] L’île se trouve dans le circuit des tournées françaises en Afrique […]. Les troupes souvent prestigieuses de la décentralisation française se produisent dans des cinémas et leur venue est gérée par la préfecture. On trouve encore la venue de spectacles privés, des opérettes pour la plupart en coproduction avec l’île Maurice[7].
Selon lui, cette situation est la conséquence de l’immobilisme qui caractérise l’île depuis l’origine de son peuplement : « L’histoire du théâtre [est] un reflet de l’histoire tout court, notamment économique et sociale […][8] ».
Commencer par Ubu roi consiste donc à introduire un désordre salvateur à l’intérieur de l’ordre ronronnant qui prévaut sur l’île. Jarry, en son temps, suscita un scandale mémorable lors de la création de sa pièce. C’est ce même phénomène que désire provoquer Genvrin en reprenant l’oeuvre de son illustre prédécesseur. Il se montre très attentif à respecter les consignes figurant dans les textes de présentation du drame en cinq actes qu’avait rédigées le dramaturge. Jarry ayant insisté sur le fait que « devant un grand public, différemment, n’importe quel décor artiste est bon, la foule comprenant non de soi, mais d’autorité[9] », Genvrin précise que « le rideau est ainsi constitué par 100 m² de goni lavé à l’eau de Javel et cousus ensemble, sur la scène des caisses récupérées chez les commerçants […][10] ». Jarry ayant préconisé que « l’acteur devra substituer à sa tête, au moyen d’un masque l’enfermant, l’effigie du PERSONNAGE […][11] », Genvrin impose le port de masques gigantesques à ses acteurs. Jarry ayant spécifié que durant la représentation « divers pianos et timbales exécut[e]nt les thèmes d’Ubu derrière la coulisse[12] », Genvrin prône « […] une certaine recherche musicale s’adaptant aux scènes […] à partir d’instruments de percussion[13] ». Le seul point sur lequel le metteur en scène réunionnais contrevient aux recommandations du dramaturge parisien réside dans le choix du lieu pour les représentations, Jarry notant : « […] les collines suffisent, avec quelques arbres pour l’ombre[14] », quand Genvrin, non sans fierté, souligne : « Le premier vrai théâtre sera construit au Tampon en 1979 : la troupe Vollard en assurera l’inauguration avec un « Ubu roi » remarqué[15] ». Néanmoins, en soi l’inversion est jarryque, puisque, quand l’un désire s’extirper du lieu clos que constitue le théâtre parisien pour se transporter dans un cadre campagnard, l’autre se réjouit que le théâtre, qui le plus souvent est joué en plein air, puisse enfin bénéficier d’un édifice pérenne. Mais quand, quinze ans plus tard, Genvrin fera représenter Votez Ubu colonial, création originale d’après Jarry et Vollard, il indiquera dans la didascalie liminaire de son texte « L’action se joue « Chez Marcelle »[16] » exauçant ainsi facétieusement le souhait émis par le créateur d’Ubu.
Le choix d’Ubu roi comme pièce inaugurant l’activité de la troupe, celui de Vollard comme patronyme de cette troupe contiennent l’ensemble des éléments que Genvrin considère comme fondateurs du théâtre sur l’île de la Réunion. Pourtant, l’esthétique jarryque participe d’un théâtre de la rupture qui implique bien évidemment l’existence d’une situation antérieure de laquelle l’on désire s’affranchir. Or cette perspective ne saurait être celle que s’assigne le Théâtre Vollard, car il n’y a rien qui puisse être subverti, ridiculisé, anéanti, puisque précisément il n’existe rien à subvertir, ridiculiser, anéantir sur le plan théâtral. Mais, s’il se veut pionnier, Genvrin ne se considère pas pour autant comme un primitif défricheur d’espaces vierges. Et à ce titre, en adaptant Ubu roi au contexte spécifique de l’île de la Réunion, il retrouve le geste créateur de Jarry édifiant sa pièce sur les vestiges d’un théâtre antérieur. Nous le savons, le dramaturge français parodie Molière et Racine, et surtout opère de nombreux emprunts au Macbeth de Shakespeare dans son drame en cinq actes. Or, en adaptant Ubu roi, Genvrin est en quête des structures fondatrices du théâtre occidental. Procédant obliquement, il recherche, à l’intérieur de l’hypertexte qu’il représente, l’hypotexte qui irrigue l’œuvre de référence. Et, dans cette optique, le théâtre de Shakespeare constitue un socle apte à permettre l’érection d’une œuvre puisant ses racines au plus profond de l’Histoire et ainsi à susciter l’émergence d’un discours conférant une histoire à l’île de la Réunion. En 1980, Genvrin adapte Une tempête d’Aimé Césaire[17]. S’il choisit cette pièce, c’est parce qu’il perçoit une parenté entre la littérature nègre, fondatrice de l’identité antillaise propre au théâtre de l’écrivain martiniquais, et la revendication identitaire, qui se fait jour à l’intérieur de la théâtralité réunionnaise. Analysant la pièce de Césaire, Romuald Fonkua note : « Les trois personnages de la pièce, Caliban, Prospero et Ariel vivent un drame. Ils ne peuvent se séparer, puisqu’ils appartiennent tous à la même terre, au même pays, et nourrissent pour celui-ci des aspirations semblables, malgré leurs différences raciales[18] ». À la Réunion, île inhabitée avant l’arrivée des premiers occupants français, plus encore qu’à la Martinique, l’osmose entre des populations hétérogènes, que leur niveau socio-économique organise hiérarchiquement, s’avère nécessaire si l’on désire leur assurer un devenir harmonieux. Or, cette finalité que Genvrin assignait à son spectacle ne fut pas perçue par les autorités culturelles de l’île qui ne retinrent que les brûlots constitués par certaines des répliques de Caliban : « Nous avions décidé de monter Tempête, d’après Shakespeare et Aimé Césaire. Le directeur de l’époque de la MJC du Tampon m’a présenté une version du texte où il avait souligné toutes les répliques que nous ne devions pas dire. Il y avait notamment le célèbre « tu m’a appris le langage et je l’ai retourné contre toi », révolte du Noir ayant fréquenté l’école du Blanc[19] ». Afin de justifier la censure qu’ainsi il opérait, le responsable culturel précisa à l’intention de Genvrin : « Vous ne pouvez pas dire ça ! La Réunion ce n’est pas la Martinique[20] ». Et celui-ci de s’amuser : « Mais cette citation n’est pas de Césaire mais de Shakespeare. Je me retrouvais donc devant un directeur de théâtre qui censurait Shakespeare, y voyant une sorte de slogan maoïste…[21] ».
Ainsi, au travers des textes de Jarry et de Césaire qu’il adapte au contexte spécifique de la Réunion, Genvrin place Shakespeare au centre de ses pièces, car il perçoit l’auteur dramatique élisabéthain comme le véritable trait d’union qui relie le théâtre à la Réunion. Mais, chaque fois, la source qui irrigue sa création théâtrale est dissimulée derrière des réécritures, qui conjointement occultent et exhibent la matrice de leur texte. Ecrire d’après et sur un texte exogène, tel sera pour Genvrin l’acte fondateur de son écriture propre.
Commencements
Avant de s’établir à la Réunion et de créer le Théâtre Vollard, Emmanuel Genvrin participa dans le cadre d’une troupe universitaire à l’adaptation et à la mise en scène de La Paix, spectacle créé d’après Aristophane. Il y interprétait le rôle de Trygée. Le texte de cette réécriture de la comédie antique ne fut pas publié, mais il est remarquable que Genvrin en fasse mention dans sa bibliographie. Et, de fait, si l’on prend en compte l’importance qu’il confère ainsi à cette pièce au regard de sa création ultérieure, certains des aspects qui caractérisent sa théâtralité trouvent indéniablement leur origine dans l’œuvre d’Aristophane. En premier lieu, l’aspiration à la concorde qui anime les habitants d’un territoire confrontés tout au long de leur histoire aux soubresauts de conflits tant internes qu’exportés par la mère-patrie. Mais aussi une dénonciation constante de la démagogie, d’une parole sournoise, manipulatrice, visant à s’attribuer un pouvoir sans limite en dupant autrui et en mettant à profit sa crédulité pour déployer à son encontre une extrême férocité, exercice dans lequel Ubu apparaît comme une moderne résurgence des modèles forgés par Aristophane. Mais encore un goût du spectacle, des machines, des artifices, des masques, des manifestations festives, des adresses au public effectuées par des choreutes ayant ôté leur masque… La définition que propose Victor-Henry Debidour de la structure des comédies d’Aristophane pourrait sans modifications majeures s’appliquer au théâtre de Genvrin : il « n’a pas d’intrigue à développer, mais une donnée à exploiter, pas d’actes mais des mouvements, pas de dénouement mais un bouquet final en guise d’adieu[22] ».
Ainsi, partant de Jarry, puis de Césaire, afin de mieux retrouver Shakespeare, pour enfin remonter jusqu’à Aristophane, Genvrin confère une identité au théâtre réunionnais en recourant à des langages qu’il considère comme fondateurs chacun à leur époque, en adoptant des esthétiques qu’il juge essentielles pour l’expression de la théâtralité occidentale : le théâtre pataphysique, le théâtre de la négritude, le théâtre élisabéthain et la comédie antique. Le corpus défini, les pièces de référence transposées dans le contexte spécifique de la Réunion, les représentations ayant donné tant par leur efficience propre que par l’accueil reçu auprès du public toute satisfaction, Genvrin peut alors se livrer à l’écriture de ses propres textes. D’emblée, l’émergence de la forme théâtrale s’inscrit au plus profond de l’histoire et de la légende. Marie Dessembre, créée en décembre 1981, tisse ainsi conjointement les fils de l’histoire et de la légende, de l’histoire ancienne et de l’histoire actuelle, de l’histoire qui provient de la métropole et de l’histoire qui s’écrit à la Réunion.
Le 20 décembre 1848, une jeune esclave, Marie-Mirandine, meurt en mettant au monde l’enfant qu’elle a conçue avec le fils de son maître. Ce même 20 décembre 1848, Sarda Garriga promulgue le décret abolissant l’esclavage à l’île de la Réunion. Le 20 décembre 1981, « Marie Dessembre descend du ciel. Les comédiens blancs et noirs la portent en triomphe[23] ». Et « le 20 décembre 1981 lors d’une grande fête populaire sur le Barachois, les comédiens ont mis en scène une reconstitution du débarquement de Sarda Garriga[24] ». Donc, Marie Dessembre, lors de sa création, « […] avait été en phase avec l’explosion de liberté qui succéda aux élections de 1981[25] ». Oubliant en apparence les modèles qui présidèrent à ce tournant que constitua pour lui l’écriture de sa première pièce, Genvrin s’immergea au plus profond de la matière locale que lui offrait la conjonction d’un épisode historique majeur et d’une légende ayant valeur de mythe que chacun sur l’île conservait en mémoire.
La pièce, fondatrice d’un théâtre authentiquement réunionnais, écrivait et faisait représenter chaque soir sur scène l’histoire de la Réunion, une histoire occultée car dans les faits méprisée par le théâtre français métropolitain. L’interaction que désirait susciter Genvrin entre l’imaginaire du théâtre et la réalité de l’Histoire fut emblématisée par l’arrivée sur scène à la fin de l’acte II du personnage de Sarda Garriga et par l’invitation faite au public de venir lui serrer la main et de lui remettre un franc afin de participer à l’érection de sa statue. Le passé s’estompant au profit du présent, le théâtre au bénéfice du devoir de mémoire, Marec harangue la foule en lui démontrant que l’île préfère honorer les esclavagistes plutôt que ceux qui ont œuvré pour l’abolition de l’esclavage :
En effet zot la remarqué devant la préfecture nana le grand statue de Mahé de Labourdonnais, l’homme que la organisé l’esclavage ici même et à l’île Maurice tandis que sat la aboli la rien qu’un p’tit galet ek trois mots écrits dessus là-bas su le barachois Saint-Denis. Si zoy lé d’accord i fo change ça[26].
Genvrin, qui inaugurait de la sorte l’abolition de la frontière traditionnelle prévalant entre la scène et la salle en requérant la participation active du public au spectacle, fut pris à son propre jeu, car ne tenant aucun compte de l’interprétation outrancièrement mécanique adopté par le comédien incarnant le commissaire de la république, chacun tint à se rendre sur le plateau pour serrer la main du grand homme : « Nous nous voulions ironiques et provocateurs mais le public l’a pris au premier degré et chaque soir la scène s’est étirée en longueur, les parents et leurs enfants se faisant un devoir de serrer avec respect la main du « libérateur »[27] ».
Toutefois il inventait, en créant cette pièce, les linéaments de la théâtralité qui caractérisera l’ensemble de ses spectacles postérieurs. Certes, le principe de la confrontation des langues, les maîtres parlant le français et les esclaves le créole, est emprunté aux pièces de Vollard et avait été expérimenté dans Ubu roi ; certes, l’insertion des chants, des danses et de la musique avait déjà été utilisée lors des représentations de La Paix et de Tempête ; certes, le recours à l’Histoire comme moteur de l’action dramatique, le mélange du drame et de la farce au sein de l’oeuvre trahit l’influence qu’exerce l’œuvre de Shakespeare sur la conception et la composition de sa pièce ; il n’en demeure pas moins que ces références à un théâtre, que Genvrin définit comme l’origine de son propre théâtre, le conduisent à créer un théâtre authentiquement originel pour l’île de la Réunion. Au fil des répétitions puis des représentations, l’œuvre singulière devient un texte collectif qui entérine l’acte de naissance du Théâtre Vollard : « Marie Dessembre, c’est les débuts de Vollard, le choix d’un théâtre collectif, un théâtre de groupe. Il n’y a pas de rôles principaux, c’est quelque chose d’inhérent à une troupe qui démarre, ce phénomène de « bande » où la bonne humeur l’emporte[28] ». Le succès remporté par la pièce auprès du public est considérable, à tel point que Genvrin doit refuser les reprises du spectacle qui lui sont régulièrement demandées : « […] il nous fallait asseoir un répertoire nouveau car pour les jeunes compagnies le succès est autant mortel que l’échec et nous risquions de devenir la troupe « d’une seule pièce »[29] ». Et, de fait, si sur cette matrice s’élaborèrent durablement les œuvres postérieures du Théâtre Vollard, Marie Dessembre conserva toujours cette saveur inhérente aux textes fondateurs, au point qu’à chaque fois que le troupe fut en danger de disparaître, elle reforma son unité en jouant de nouveau cette pièce.
Spectacle après spectacle, Genvrin réécrivit l’histoire de l’île, rappelant les grands événements oubliés, ressuscitant des figures occultées, plaçant chaque fois le peuple au centre de l’action dramatique, bref, oeuvrant au service d’un devoir de mémoire restitué sous la forme d’une saga riche en couleurs, à tel point qu’au fil du temps, l’émergence de son théâtre put être confondue avec la résurgence d’une histoire mêlant étroitement le passé et le présent. Dans Runrock il associe même les trois axes constitutifs de l’appréhension du temps. Prenant prétexte d’un événement s’étant déroulé au présent – « En mars 1986 grâce à une forte coulée de lave à la « pointe de la Table » la Réunion s’agrandissait d’une dizaine d’hectares[30] », il établit le lien qui relie ce phénomène récent aux origines lointaines de l’île – « La naissance (c’est ainsi qu’est née la Réunion) ou l’agrandissement des terres provoque la fascination[31] » – et il transpose théâtralement le récit fondateur attendu sous la forme d’une utopie futuriste – « Sur Runrock, volcan surgi de la mer en 2050 au sud de la Réunion […][32] ». Inversant les données chronologiques, le passé le plus ancien étant restitué sous la forme d’un futur lointain, Genvrin manifeste de façon ostensible son refus de céder à la tentation qui consisterait à écrire des « scènes historiques », sur le modèle de celles produites au XIXe siècle par un certain théâtre français, afin d’œuvrer à l’instruction d’une population locale singulièrement acculturée. Il n’en demeure pas moins qu’en ancrant profondément l’action de ces pièces dans la réalité réunionnaise, il s’est affranchi des codes constitutifs du théâtre qu’à ses débuts il tenait pour originaires de son propre théâtre. À commencer bien évidemment par cette consigne qu’énonce Jarry au terme de son « Discours prononcé à la première représentation d’Ubu roi » : « Quant à l’action, qui va commencer, elle se passe en Pologne, c’est-à-dire Nulle Part[33] ».
Comment c’est ?
Mais Jarry précise dans sa « Présentation d’Ubu roi » : « Nulle part est partout, et le pays où l’on se trouve, d’abord. C’est pour cette raison qu’Ubu parle français[34] ». La première mise en scène du Théâtre Vollard se présentait effectivement comme une adaptation du texte originel, conservant la vocation universelle que lui avait assignée son créateur, mais que Genvrin avait inscrite dans le contexte spécifique de la Réunion. En procédant de la sorte, il semblait manifester le désir d’ancrer au sein d’une réalité nettement définie sur les plans historique et géographique une œuvre qui ne possédait pas pour dessein bien évidemment d’évoquer la Réunion. Dans les faits, son approche paraît plus complexe. En constituant un décor avec des gonis et des caisses d’importation, en faisant jouer ses comédiens masqués et en utilisant la musique comme un langage à part entière, Genvrin fait représenter devant le public réunionnais un Ubu roi décontextualisé. Mais conformément à ce nulle part qui est le pays où l’on se trouve, il réécrit la fin de la pièce en recourant à « […] un jeu de mots dans le style jarryque : « l’île où les masques règnent » (homophonie de Mascareignes, nom donné à l’archipel formé par les îles Maurice, Rodrigues et de la Réunion)[35] ». Et c’est pour cette raison qu’Ubu parle créole !
En 1994, Genvrin revient à l’origine de son théâtre en mettant de nouveau en scène le personnage d’Ubu. Mais, fort de l’expérience acquise, il ne propose pas une nouvelle version d’Ubu roi. Il procède à une réécriture opérant par contamination en empruntant sa structure dramatique au drame de Jarry et ses motifs à des textes d’Ambroise Vollard, La Politique coloniale du père Ubu et Les Problèmes coloniaux à la SDN. Ubu, Jarry, Vollard, Genvrin, la structure originelle est reconstituée, mais la trame narrative de la pièce est profondément immergée dans le contexte politique du début des années 90. Ce nouvel avatar du personnage se vante au début de l’acte I de ses récents exploits militaires – « Ma botter l’cul band’ Serbes et band’ Bosniaques ![36] » –, puis à la fin de l’acte IV, convaincu de forfaiture et sur le point d’être arrêté, il annonce qu’il repart pour de nouvelles aventures guerrières – « On m’attend pour un grand safari technique… au Rwanda ![37] ». En outre, comme il avait pris soin auparavant de situer chacune de ses pièces dans un lieu emblématique de l’histoire de la Réunion – L’Esclavage des Nègres est joué dans la salle des Étuves ; Lepervenche – Chemin de fer se déroule sur le site de la Grande chaloupe ; Colandie dans la cour d’une usine à sucre désaffectée… -, cette fois, comme l’indique la didascalie liminaire, « l’action se joue « Chez Marcelle », table d’hôte quelque part dans les îles[38] », dans les faits dans un « établissement de la ruelle chinois [Sic] à Saint-Denis[39] ». Ainsi, lorsque Genvrin eut acquis la certitude d’avoir conféré à son théâtre une identité véritable, il éprouva la nécessité de revenir aux sources mêmes de ce théâtre. Il ne s’interroge pas sur les origines du théâtre, sur la constitution, l’expression et l’efficience de ce langage, de ce processus, de ce genre ; il interroge la validité que conservent des textes qui irriguent sa création depuis son origine. En 1979, parallèlement aux représentations d’Ubu roi, il avait présenté une exposition afin de faire « découvrir au public réunionnais l’Ubu colonial paru dans l’Almanach de 1901, illustré par Bonnard avec des légendes en créole et les chansons Tatane et Soucouille pas trop fort Madeleine, soulignant le lien entre Jarry le dramaturge et Vollard l’amateur d’art […][40] ». En 1994, lors de la publication de l’ouvrage contenant le texte de Votez Ubu colonial, il insère à sa suite L’Almanach du XXe siècle (Ubu colonial) ainsi que deux pièces d’Ambroise Vollard. Il affirme ainsi que l’émergence de son théâtre étant tardive, sa nature propre ne peut être qu’intertextuelle. Il ne saurait créer ex nihilo, il ne peut écrire qu’au sein d’un univers déjà saturé de textes. Les pièces fondatrices de son théâtre ne constituent pas à ses yeux des œuvres appartenant à un contexte géographique étroitement circonscrit et à un passé définitivement révolu, mais se révèlent devenir sous sa plume des œuvres vivantes qu’il s’approprie pour les transporter en un lieu et dans un temps qui lui sont propres.
Désirant présenter un spectacle dans le cadre des commémorations du bicentenaire de la Révolution Française, Genvrin exhume le manuscrit de L’Esclavage des Noirs ou l’heureux naufrage d’Olympe de Gouges. Si, rapportée au contexte spécifique de la Réunion, la pièce présente quelque intérêt, en elle-même elle ne possède qu’une valeur littéraire des plus médiocres. Toutefois, après avoir effectué quelques rares suppressions et de menues transformations à l’intérieur du texte, il décide de faire représenter par le Théâtre Vollard sous le titre L’Esclavage des Nègres cette œuvre du XVIIIe siècle. Mais, tout en demeurant texte, la pièce deviendra pré-texte d’un autre texte et prétexte à un autre texte. Concevant son spectacle sous la forme d’un diptyque, il fait précéder son adaptation de l’œuvre d’Olympe de Gouges par un drame inédit, Étuves, qui relate la création du Théâtre Égalité sur l’île de la Réunion lors de la période révolutionnaire. La dramaturgie de cette “ouverture”, qui représente le caractère novateur du choix de la pièce effectué par un metteur en scène ouvert aux idées nouvelles provenant de la métropole, le cadre conflictuel des répétitions durant lesquelles les comédiens expriment leurs interprétations divergentes sur le contenu du texte, ainsi que la peinture suggestive des réactions manifestées par les autorités politiques de l’île craignant l’influence des idées d’Olympe de Gouges sur le public, métamorphose paradoxalement la valeur de l’œuvre originelle en lui restituant son identité première, qui résidait précisément dans la transgression qu’elle désirait opérer à l’intérieur du système idéologique ayant alors cours en France.
Nous le constatons, Genvrin n’affirme pas : « c’est ainsi », mais questionne :
« comment est-ce ? ». Aussi le texte originel constitue-t-il pour lui une véritable interrogation à laquelle il va s’efforcer d’apporter une réponse en assignant à son propre texte la fonction de « continuation » selon le sens dévolu au terme par Gérard Genette[41]. Il s’inscrit donc dans la perspective de « l’œuvre ouverte » définie par Umberto Eco et, plus précisément, dans le sillage de « l’œuvre inachevée » dont Michel Butor décrit ainsi le mécanisme :
On peut donc, à première vue, interpréter l’œuvre ouverte comme l’intersection de deux formes, l’une en plein, l’autre en creux, celle-ci pouvant être également en expansion, le plein révélant un fragment de ce qui l’interrompt[42].
De ce fait, le texte de la pièce reproduit dans les pages de l’ouvrage ne doit être considéré que comme l’une des versions possibles de ce texte, puisque, représentation après représentation, reprise après reprise, il évolue, s’altère, se modifie. La participation du public est requise. Il apporte une contribution active lors des représentations, chantant, dansant, buvant, mangeant, et se trouve parfois à l’origine de ces transformations, qui s’opèrent spontanément au présent, mais qui peuvent aussi influer sur les changements opérés ultérieurement. Afin de rendre la moins étanche possible la séparation que le théâtre institue entre la scène et la salle, Genvrin dramatise ces interventions des spectateurs lors des représentations. Dans Runrock, recourant à la stratégie du théâtre dans le théâtre, le personnage dénommé LaLoi, qui est acteur dans le récit-cadre, est convié à devenir comédien et à jouer son propre rôle dans les scènes encadrées :
PAYEN
Il y a la scène où vous nous faites tous prisonniers. Il faut que vous montiez sur le plateau.[43]
Jouant de cette connivence établie avec son public depuis la fondation du Théâtre Vollard, Genvrin fait fictivement nommer le héros de sa pièce par les spectateurs, dont bien évidemment la mémoire ne saurait être prise en défaut :
Papin – À c’t’heure, nous peut plus appelle à lu Belbel, i faut donne à lu un nouveau nom, un nom d’la guerre ! (Ils consultent le public.)
[…]
Rougail, près d’un spectateur — Monsieur propose « Ubu » !
Tous – Bravo, capitaine Ubu !
Belbel – Merdre !
Tous – Ubu, Ubu !…[44]
Belbel, employé du restaurant « Chez Marcelle », devient métaleptiquement Ubu, et surtout anaphoriquement le héros de la première pièce créée par Genvrin. La fascination qu’exerce sur le dramaturge l’origine de son propre théâtre le conduit à réécrire sous la forme d’une « continuation » ostensible l’œuvre initiale. En effet, une dizaine de créations originales se sont insérées entre les deux états du Ubu réécrit par Genvrin, qui toutes retraçaient les grandes heures de l’île. En injectant plus expressément qu’il ne l’avait fait dans son Ubu roi des références précises aux situations socio-politiques prévalant tant sur le plan local que dans le domaine international, l’écrivain semble appliquer à la lettre la préconisation prônée par Butor à propos du « texte inachevé » : « […] l’activité poétique, l’« inspiration » manifeste la réalité même comme inachevée[45] ». Or, dès Ubu roi, ce fut le constat de cet inachèvement du monde, que reflétait l’inachèvement par essence de la pièce d’Alfred Jarry, qui le conduisit à poser l’acte fondateur de son théâtre, en sachant pertinemment qu’il ne pouvait se suffire à lui-même et qu’il lui faudrait revenir régulièrement vers ce point de départ afin sans cesse de le déplacer et de le transformer.
Les deux derniers spectacles créés par le Théâtre Vollard sont des opéras. Lors de la création en 2005 de Maraina, le premier d’entre eux, Genvrin insista à maintes reprises sur le désir d’un retour aux origines qui gouvernait son projet. Il existe une tradition ancienne, à Maurice comme à la Réunion, de l’opérette et de l’opéra. Alors que ces genres tombaient en désuétude sur l’île de la Réunion, déjà en 1982 Genvrin avait monté un Orfeo d’après Monteverdi. Mais plus profondément, l’opéra de 2005 s’inscrit dans la veine ouverte par Marie Dessembre : « […] cette histoire de métissage et de naissance, d’enfant « bâtard » renvoie au mythe des origines de la Réunion, de son peuplement par les premiers Français et leurs compagnes malgaches, les grand-mères de la plupart des Réunionnais »[46]. Les deux œuvres relatent des événements fondateurs de l’identité réunionnaise en écrivant le récit d’une histoire pathétique qui s’était déroulée dans les marges de l’Histoire nationale. Toutes deux font appel à un orchestre et à des chœurs pour conférer une teneur dramatique à la simplicité de leur trame narrative. Replaçant par contraste les événements dans leur contexte historique, Maraina se présente néanmoins comme une réécriture de Runrock, car l’opéra comme la comédie retracent la première tentative de peuplement de l’île sous la gouverne de Louis Payen, qui pour l’occasion retrouve ici son véritable prénom. Cette histoire des origines située dans le passé élimine les artifices clinquants qui conféraient une coloration futuriste au décor et aux costumes de Runrock. Cette fois, la scénographie est dépouillée et les costumes constellent le plateau nu de taches de couleur. Genvrin présente l’ensemble de ses choix comme un désir de revenir à l’élémentaire, de fonder sa nouvelle approche du théâtre sur les fondements mêmes de l’opéra : « Le mythe et la tragédie sont les sources de l’opéra. Les origines de la Réunion s’y prêtent avec leur part de mystère[47] ».
Si génériquement la substitution de l’opéra au théâtre constitue une rupture ; dans les faits, il ne s’agit que d’une inversion entre la répartition de la part dévolue au chant et à la musique d’une part et au texte d’autre part. En effet, comme le souligne Genvrin lui-même : « […] je faisais de l’épique… J’ai trouvé mon bonheur dans l’écriture de livrets d’opéra, qui sont fondamentalement de l’ordre du mythe, de l’épique[48] ». Paradoxalement, l’écriture d’un opéra contraint à un retour vers l’essentiel, l’essence du théâtre, le mot, qui se doit d’être choisi avec une attention toute particulière : « Je me suis donc mis à écrire des livrets. Ça oblige à une dynamique d’écriture, à aller à l’essentiel. […] Quand on voit un livret écrit, on est étonné de sa minceur : chanter un mot prend trois fois plus de temps que le dire au théâtre. […] C’est comme retourner à l’essence du théâtre[49] ». Et le théâtre originaire propre à Genvrin de nourrir cette partition réduite à l’épure. Le décor de l’île, le conflit entre les maîtres et les esclaves opposant les nouveaux occupants, offrent une amplification à certains des motifs déjà développés dans Tempête. Le souffle de Shakespeare traverse cette œuvre qui associe au sein d’une texture dominée par la tonalité du pathétique les registres du drame, du mythe, de l’épopée et du récit historique. Enfin, « nulle part [étant] partout, et le pays où l’on se trouve, d’abord », Genvrin parvient, grâce à cet opéra qui associe des habitants de la Réunion, de Maurice et de Madagascar, à créer cette « île où les masques règnent », ces Mascareignes devenues le temps d’un spectacle une seule et même île. L’éternel retour vers ses origines qu’effectue inlassablement le théâtre de Genvrin procède donc au travers d’un mouvement continuel qui chaque fois déplace insensiblement son point de départ.
| Michel Bertrand
Notes
[1] Les Anglais se rendirent maîtres de l’île, appelée à cette époque « l’île Bonaparte », durant une courte période, de 1810 à 1814. Perdue par la France à la suite de la bataille de la Redoute, en juillet 1810, l’île, redevenue « l’île Bourbon », lui fut restituée lors du traité de Paris le 30 mai 1814. Mauritius et Rodrigues, en revanche, demeurèrent britanniques.
[2] Emmanuel Genvrin, Étuves, « Préface », La Possession, Éditions Théâtre Vollard, 1988, p. 4.
[3] Id.
[4] L’opéra a été créé en 2005 à l’île de la Réunion. Il a été enregistré le 28 juin 2009 au théâtre Silvia Monfort de Paris par César Paes.
[5] Alfred Jarry définit ainsi ce qu’il dénomme la pataphysique : « La pataphysique est la science des solutions imaginaires, qui accorde symboliquement aux linéaments les propriétés des objets décrits par leur virtualité. » (Alfred JARRY, Gestes et opinions du Docteur Faustroll, pataphysicien, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2004, [1911], p. 492). Le collège de pataphysique, fondé en 1948 dans le sillage de Jarry, s’est assigné pour mission de procéder à des “recherches savantes et inutiles”.
[6] Emmanuel Genvrin, « L’Exemplaire et édifiante aventure du Théâtre Vollard à l’île de la Réunion », Paris, Cassandre/Hors champ, n° 79, 22/09/2009, p. 60.
[7] Emmanuel Genvrin, « Histoire du théâtre à l’île de la Réunion », Dire, numéro spécial, Bujumbura, décembre 1992, p. 13 et p. 16.
[8] Ibid., p. 13.
[9] Alfred Jarry, « De l’inutilité du théâtre au théâtre », Oeuvres, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2004, [1896], p. 239.
[10] Emmanuel Genvrin, « Ubu roi d’Alfred Jarry. Sa réincarnation à la Réunion », Campus, n° 3, décembre 1979.
[11] Alfred Jarry, « De l’inutilité du théâtre au théâtre », art. cit., p. 240.
[12] Alfred Jarry, « Discours d’Alfred Jarry prononcé à la première représentation d’Ubu roi», Œuvres, op. cit., p. 239.
[13] Emmanuel Genvrin, « Ubu roi d’Alfred Jarry. Sa réincarnation à la Réunion », Campus, n° 3, Saint-Denis de la Réunion, décembre 1979.
[14] Alfred Jarry, « De l’inutilité du théâtre au théâtre », art. cit., p. 241.
[15] Emmanuel Genvrin, « Histoire du théâtre à l’île de la Réunion », art. cit., p. 17.
[16] Emmanuel Genvrin, Votez Ubu colonial, Saint-Denis de la Réunion, Grand Océan, 1994, p. 27.
[17] Il s’agit, en l’occurrence d’une référence shakespearienne au second degré, puisque la pièce de Césaire constitue une réécriture antillaise du drame de Shakespeare, La Tempête.
[18] Romuald Fonkua, Aimé Césaire, Paris, Perrin, 2010, p. 340.
[19] Emmanuel Genvrin, in Laurent Barbotin, « Emmanuel Genvrin ou la culture « en milieu hostile » », Quotidien du dimanche, n° 347, 18 septembre 1994, p. 6.
[20] Emmanuel Genvrin, « L’Exemplaire et édifiante aventure du Théâtre Vollard à l’île de la Réunion », art. cit., p. 61.
[21] Emmanuel Genvrin, in Laurent Barbotin, « Emmanuel Genvrin ou la culture en milieu hostile », art. cit., p. 6.
[22] Victor-Henry Debidour, Aristophane, Paris, Seuil, coll. « Écrivains de toujours », 1979, p. 28.
[23] Emmanuel Genvrin, Marie Dessembre, La Possession, Éditions Théâtre Vollard, 1987, p. 45.
[24] Ibid., « Préface », p. 4.
[25] Ibid., p. 3.
[26] Ibid., p. 34.
[27] « Préface », in ibid., p. 3.
[28] Emmanuel Genvrin, « Marie Dessembre : Vollard fait un retour aux sources », Témoignages, 8 janvier 1988.
[29] Emmanuel Genvrin, « Préface », in Marie Dessembre, op. cit., p. 3.
[30] Emmanuel Genvrin, « Préface », in Runrock, La Possession, Éditions Théâtre Vollard, 1988, p. 3.
[31] Id.
[32] Emmanuel Genvrin, Runrock, p. 9.
[33] Alfred Jarry, « Discours d’Alfred Jarry prononcé à la première représentation d’Ubu roi », in Œuvres, p. 244.
[34] Alfred Jarry, « Présentation d’Ubu roi », in Oeuvres, [1896], p. 245.
[35] Agnès Antoir, « Préface. De Jarry à Vollard, de Vollard à Jarry », in Emmanuel Genvrin, Votez Ubu colonial, op. cit., p. 10.
[36] Emmanuel Genvrin, Votez Ubu colonial, op. cit., p. 34.
[37] Ibid., p. 106.
[38] Ibid., p. 27.
[39] Ibid., p. 22.
[40] Agnès Antoir, art. cit., p. 10.
[41] « La continuation est donc une imitation plus contrainte que l’apocryphe autonome, et plus précisément une imitation à sujet imposé. », Gérard GENETTE, Palimpsestes. La Littérature au second degré, Paris, Seuil, coll. « Poétique », 1982,
p. 183.
[42] Michel Butor, « La Critique et l’invention », in Répertoire III, Paris, Minuit, 1968, p. 113.
[43] Emmanuel Genvrin, Runrock, op. cit., p. 66.
[44] Emmanuel Genvrin, Votez Ubu colonial, op. cit., p. 37.
[45] Michel Butor, art.cit., p. 113.
[46] Agnès Antoir, « Introduction », livret-programme de Maraina, Sainte Clotilde, Théâtre Vollard, 2005, p. 3.
[47] « Jean-Luc Trulès, Emmanuel Genvrin, Entretien », in ibid., p. 12.
[48] Emmanuel Genvrin, « L’Exemplaire et édifiante aventure du Théâtre Vollard à l’île de la Réunion », p. 65.
[49] Id.
Pour citer cet article
Michel Bertrand, « Emmanuel Genvrin : constitution à l’Île de la Réunion d’un théâtre des origines – Sur l’absence des origines de ce théâtre », Revue d’Historiographie du Théâtre numéro 3 [en ligne], mis à jour le 01/01/2017, URL : https://sht.asso.fr/emmanuel-genvrin-constitution-a-lile-de-la-reunion-dun-theatre-des-origines-sur-labsence-des-origines-de-ce-theatre/